Ah, les immigrés ! La pop-rock en fait souvent un miroir social, entre respect, curiosité et sens de la justice. Led Zeppelin (Immigrant Song) propulse le mot en titre d'un chant viking devenu culte, comme pour dévoiler nos fantasmes d’“invasion”. Puis le collectif emmené par K’naan (Immigrants – We Get The Job Done) renverse aussitôt la focale : l’utilité sociale est concrète, mesurable, fière. Vient alors la question de l’intégration : Charlie Winston (In Your Hands) dépeint l’infernal labyrinthe administratif où submergeant la responsabilité individuelle, quand Pierre Perret (Lily) raconte un trajet de petits boulots vers l’engagement pour les valeurs du pays d’accueil.
Reste le regard posé sur celles et ceux “venus d’ailleurs”. The Doors (People Are Strange) en cristallisent le malaise intime, quand The Stranglers (I Feel Like a Wog) s’en prennent frontalement aux étiquettes et aux humiliations infligées à des “gamins d’ici”. Car avant tout cela, l'exil est d'abord un choix douloureux et risqué : si j'ironise sur la chance qu'il a fallu à Lucie N'Diaye pour venir travailler chez nous, Alpha Blondy (Immigrés – La Méditerranée n’a pas pitié) lance un avertissement lucide et cru aux candidats au départ. On comprend mieux, alors, le besoin de se rassembler dans la solidarité et les rituels communautaires : Gogol Bordello (Immigrant Punk) revendique la fierté d’une tribu bigarrée qui se serre les coudes, et Zdob Și Zdub (Everybody in the Casa Mare) ouvre la grande maison à “tout le monde”, pour que la fête tienne lieu de patrie provisoire.